Alors qu’elle a suscité de vives controverses ces derniers mois, la réforme des retraites est enfin entrée en vigueur le 1er septembre, apportant son lot d’interrogations et de préoccupations. Que l’on soit salarié ou travailleur indépendant, de nombreux individus avancent dans l’incertitude, dépourvus d’une vision d’ensemble sur ses implications et sur leur avenir. Parmi les principales préoccupations figurent l’âge de départ à la retraite, les montants en jeu et la portée de la réforme.
Face à ce contexte, Blank, le compte professionnel des indépendants, et la FNAE (Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs) ont sollicité l’expertise d’OpinionWay pour sonder les autoentrepreneurs sur leur perception et leur compréhension de cette réforme.
Des entrepreneurs dans l’inconnu
2 744 auto-entrepreneurs ont partagé leurs opinions et impressions, et le constat est sans équivoque : 9 auto-entrepreneurs sur 10 ne possèdent aucune connaissance concrète du fonctionnement du régime de retraite obligatoire des auto-entrepreneurs. Un résultat préoccupant, d’autant plus que mi 2022, la France comptait plus de 2,50 millions d’auto-entrepreneurs sur son territoire (Urssaf). On en déduit donc qu’un très grand nombre d’indépendants naviguent à vue.
Il est donc bon de faire une piqûre de rappel à tous les entrepreneurs qui liraient cet article. À l’heure actuelle, la retraite obligatoire se compose de 2 volets, celle dite de base, et celle complémentaire :
- La retraite de base correspond aux cotisations sociales prélevées lors des déclarations mensuelles ou trimestrielles du chiffre d’affaires. Elle est donc obligatoire et concerne l’ensemble des personnes qui cotisent. Ensuite, en fonction de l’activité, l’auto-entrepreneur est soit affilé à la CNAV – ou le régime général (dont le calcul des droits se fait sur le revenu annuel moyen, qui correspond aux 25 meilleures années de cotisation) ; soit rattaché à la CIPAV – ou le régime des auto-entrepreneurs libéraux (dont le calcul des droits fonctionne selon un système de points sur l’ensemble de la carrière à la CIPAV).
- La retraite complémentaire vient s’ajouter à la pension “de base” et se calcule selon un système de points. Plus l’auto-entrepreneur cotise, plus il en cumule. Elle peut être gérée par de nombreux organismes tels que la RCI, la CIPAV ou Agirc-Arrco.
Pour ces deux retraites, elles ne seront complètes que si un nombre suffisamment de trimestres a été validé. Ceux-ci sont comptabilisés qu’au-delà d’un certain chiffre d’affaires, comme le résume le tableau ci-dessous. Attention, un auto-entrepreneur peut valider 4 trimestres maximum par an.
Un niveau d’information qui varie
L’étude nous apprend qu’il existe une corrélation entre l’âge de l’entrepreneur et son niveau de connaissance envers le système de retraite, ce qui paraît logique.
Ainsi, 65 % des 60 ans et plus se disent bien informés sur la retraite de base alors qu’ils sont 61 % des 18-44 ans à admettre être dans le flou. Pour la retraite complémentaire, seulement 30% de tous les répondants affirment connaître bien le fonctionnement, 55% d’entre eux ont plus de 60 ans. Bien que les résultats des personnes plus seniors soient supérieurs à ceux des autres générations, ils restent tout de même inquiétants, comme le résume Benoît Parraud, Directeur Départements Banque, Finance, Assurance et Mobilité, Tourisme, Loisirs et Membre du Comité RSE d’OpinionWay “Le constat est sans appel, les indépendants méconnaissent le système, y compris les indépendants plus seniors âgés d’au moins 60 ans qui ne sont que 65% à admettre connaître le système de base ». On apprend aussi à travers cette étude que le manque de connaissance touche toutes les activités, commerçants, artisans et professions libérables.
De plus, des écarts considérables sont à noter en fonction du chiffre d’affaires de l’auto-entrepreneur. Plus celui-ci est élevé et plus son niveau d’information croît.
Cependant, l’étude souligne également que ces résultats sont certes influencés par le manque de connaissance du système mais également par sa compréhension. Ainsi, une fois que le fonctionnement de la retraite de base et de la retraite complémentaire est expliqué, les participants démontrent une compréhension plus élevée par rapport au début du questionnaire, même si 40% des auto-entrepreneurs affirment ne toujours pas bien connaître ni le régime de base, ni le régime complémentaire. Un accompagnement plus poussé devrait donc être proposé aux auto-entrepreneurs, qui peinent à s’y consacrer.
L’avenir dans tout ça
D’après les résultats, un auto-entrepreneur sur trois n’a aucune idée de comment valider 4 trimestres de retraite par an contre seulement 8% qui affirment le savoir. Cette incompréhension est partagée par toutes les professions. Ces résultats démontrent une incapacité pour une grande part des auto-entrepreneurs à se projeter dans l’avenir.
Cependant, de par la médiatisation de la réforme et des manifestations qui s’en sont suivies, les auto-entrepreneurs ont tout de même intégré des éléments clés. Ainsi, 92% ont bien identifié l’âge légal de départ à la retraite et 76% ont saisi le concept du minimum de retraite.
Malgré tout, l’impact de la réforme adoptée en mars 2023 sur le régime de retraite des indépendants demeure flou pour une grande majorité d’entre-eux.