Chaque année, le rapport de l’Observatoire des délais de paiement examine l’évolution des conditions de règlement pour les entreprises et les entités publiques. Présenté le 13 juin dernier, celui de l’année 2022, qui s’appuie notamment sur les données du cabinet Altares, démontre que les retards de paiement ont été ramenés à 11,7 jours en moyenne pour l’an passé, versus 12,4 jours en 2021. Des résultats plutôt positifs, qui font un pied de nez aux prévisions qui étaient bien plus pessimistes. En effet, entre le contexte inflationniste, les difficultés rencontrées dans les chaînes d’approvisionnements et la crise énergétique, rien ne laisser présager une amélioration des délais de paiement. Ainsi, depuis 2021, nous assistons à une tendance à la baisse des délais clients et fournisseurs, avec des niveaux proches de ceux obtenus entre 2017 et 2019. Pour autant, toutes les typologies d’entreprise ne peuvent pas être qualifiées de “bonnes élèves” et des disparités sont à noter en fonction de la structure de la société. Effectivement, il ressort de cette étude que les TPE/PME sont les plus rigoureuses en termes de paiement, alors qu’elles sont les plus laissées-pour-compte lorsqu’il s’agit de les payer. Un phénomène d’autant plus préoccupant, surtout lorsqu’on le relie au niveau de défaillances de ces catégories d’entreprise, qui ne cesse de croître.
La France, dans le peloton de tête des meilleurs payeurs européens
Les retards supérieurs à 30 jours ont représenté seulement 6% de tous ceux observés, retrouvant son niveau d’avant-crise, bien loin des 9% obtenus durant l’année 2020. En parallèle, il y a une augmentation des “petits retard” inférieurs à 5 jours, qui sont passés à 8,7% fin 2022 contre 7,4% fin 2021. Un constat rassurant, vu les fluctuations économiques et énergétiques qui n’ont pas cessé de ponctuer l’année passée. En comparaison au reste de l’Europe, la France se situe juste derrière la Belgique, l’Allemagne et les Pays-Bas, et fait donc partie des pays les mieux positionnés en termes de délais de paiement. En effet, il est à noter que la moyenne européenne s’établit à 13 jours.
Des disparités entre les régions et les secteurs d’activité
Tous les secteurs n’ont pas pu jouir d’une régularité dans les délais de paiement. Effectivement, bien que la majorité des marchés ait connu une amélioration dans les timings de règlement, ceux de l’hébergement-restauration débit de boissons et transport-logistique souffrent toujours des répercussions de la crise sanitaire. Dans ces secteurs, les niveaux de retard moyens sont davantage autour des 16 jours, que des 12 jours recensés à l’échelle nationale. En parallèle, le secteur du conseil et services aux entreprises voit pour la première fois ses délais passer en dessous du seuil de 60 jours fixé par la loi de modernisation de l’économie, tout comme celui de la construction qui affiche pour la première fois depuis 2006 des délais fournisseurs moyens inférieurs à 60 jours.
Aussi, il existe de gros écarts en fonction des régions. Par exemple, les retards de paiement les plus significatifs sont observés en Île-de-France, avec une moyenne de 16,4 jours de retard fin 2022 bien qu’elle soit aussi en baisse comparée à l’année précédente (une moyenne de 17,3 jours notée en 2021). Au contraire, dans l’ouest de la France métropolitaine, les retards de paiement sont plus courts que la moyenne : 8,9 jours pour la Bretagne et les Pays de la Loire et 9,8 jours en Nouvelle-Aquitaine. Aussi, c’est en Corse que les retards de règlement ont le plus diminuée en 2022 avec une baisse de 2,3 jours, bien que le niveau reste plus élevé que la moyenne, avec 13,3 jours de délai.
TPE/PME, les plus rigoureuses et pourtant les plus impactées
Bien que la situation au global s’améliore quelque peu, toutes les tailles d’entreprises ne peuvent pas se targuer de payer dans les temps. En effet, là où les très grosses structures comptabilisent les retards de paiement les plus importants, les TPE/PME respectent quant à elle le plus les délais impartis. En effet, près de trois quarts d’entre elles règlent leurs factures en moins de 60 jours. Malheureusement, ce sont aussi les plus pénalisées par les retards de paiement, ce qui a un impact considérable sur leur trésorerie. Un phénomène qui est quantifié par l’Observatoire, puisqu’effectivement, il révèle que la part des grandes entreprises réglant leurs fournisseurs sans retard diminue. Le préjudice pour la trésorerie des PME s’établit à 12 milliards d’euros environ en 2021, tirant la sonnette d’alarme. Les grandes entreprises doivent donc prendre conscience que leurs comportements en termes de retards de paiement ont une incidence directe sur le sort des TPE et des PME.
Des perspectives assombries pour 2023
Alors que l’année 2022 a subi un meilleur sort que celui qu’il lui était annoncé, les perspectives pour l’année 2023 ne sont pas de bon augure. Au regard des données les plus récentes pour les premiers mois de 2023, on peut constater une légère reprise de la tendance à la hausse, en rupture avec la dynamique de 2022. Face à des retards de nouveau en augmentation, toutes les sociétés doivent se responsabiliser, ce qui est d’autant plus le cas pour les grandes structures.
Pour lutter contre ces retards et maintenir l’ordre, la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) est chargée d’effectuer des contrôles auprès des entreprises privées mais aussi publiques. En 2022, sur 1 219 entreprises qui ont subi un contrôle, 154 ont reçu un avertissement, 13 des injonctions à se conformer aux obligations légales et 238 ont obtenu un procès-verbal de constat de manquement, suivi d’une amende. Au total, 33,5 millions d’amendes ont été établies, dans le cadre de procédures de sanctions administratives. Suite à ces enquêtes, il en est ressorti que le taux d’établissements en anomalie s’élevait à 33,2% en 2022, contre 32% l’année précédente. De plus la DGCCRF n’hésite pas à citer les entreprises épinglées afin de leur faire prendre conscience de leurs actes.