Depuis plus de 3 ans, la vie des chefs d’entreprise a été ponctuée par de très nombreuses crises, avec un contexte économique plus que tendu (inflation, crise énergétique, etc.). Une situation en demi-teinte, qui a forcément eu des incidences sur leurs activités, leurs finances, et tout compte fait leur santé, qu’elle soit physique mais aussi morale. Bien que la réussite d’une entreprise repose sur de nombreux facteurs, tels que la stratégie commerciale, l’innovation, la gestion des ressources humaines, la santé des dirigeants ne doit absolument pas être négligée. En effet, elle peut avoir une incidence directe sur la pérennité d’une entreprise, par le biais de prises de décisions bâclées, de stratégies mal élaborées, ou tout simplement d’un investissement humain amoindri face à un état physique dégradé.
Cependant, bien que le bien-être des dirigeants soit en quelque sorte la pierre angulaire d’une société, de très nombreux chefs d’entreprise la sous-estiment. Un fait relaté par le neuvième baromètre réalisé par la Fondation MMA des Entrepreneurs du Futur en collaboration avec OpinionWay, portant sur la “Forme et état d’esprit des dirigeants de TPE, PME et ETI en 2023” et mené auprès de 1500 dirigeants en mai dernier. Il en ressort que malgré un niveau de confiance en l’avenir retrouvé, le niveau de stress et la notion de sacrifice restent présents dans le quotidien des dirigeants.
La confiance est en passe d’être retrouvée
Malgré les profonds bouleversements qui touchent le monde de l’entreprise, l’étude révèle que les dirigeants font preuve de résilience et portent un regard positif sur l’avenir. En effet, en ce milieu d’année, 58 % des chefs d’entreprise se disent confiants pour l’avenir de leur entreprise, contre 51 % en 2022. Un taux qui varie en fonction de l’âge du dirigeant mais également de la taille de sa structure. Par exemple, celui-ci est d’autant plus élevé chez les moins de 50 ans, qui se montrent confiants pour 65 % d’entre eux.
En parallèle, plus l’entreprise est “grande” est plus le niveau de confiance est important : 56 % chez les TPE, 65 % pour les PME et 83 % chez les ETI. Une situation résumée par Sylvie Bonello, Déléguée générale de la Fondation MMA Entrepreneurs du Futur “La Fondation interroge depuis 9 ans les femmes et hommes dirigeants français sur leur état de forme physique et psychique. Cette année, l’enquête nous révèle tout d’abord que nos chefs d’entreprise renouent avec la confiance en l’avenir.” Ce niveau de confiance va également de pair avec la motivation et 31 % des chefs d’entreprise se disent prêts à relever de nouveaux défis.
Une situation qu’il est tout de même bon de nuancer. En effet, bien que confiants quant à l’avenir de leur entreprise, un tiers des chefs d’entreprise reconnaissent la nécessité de rester prudents dans leurs choix stratégiques. De plus, un dirigeant sur quatre adopte une attitude d’attentisme et ajustera ses décisions en fonction des événements à venir. Par ailleurs, une certaine lassitude semble s’installer chez certains dirigeants. En effet, 18 % d’entre eux avouent se sentir découragés et ne prévoient plus de lancer de nouveaux projets dans les mois à venir. Une donnée en hausse, puisque cette proportion était de 14 % l’an passé.
La santé n’est pas toujours la priorité des dirigeants
Au-delà du niveau de confiance, l’étude a également analysé l’état de santé des chefs d’entreprise. Selon celle-ci, 83 % d’entre eux se déclarent en bonne santé physique, avec une proportion encore plus élevée de 86 % parmi les personnes interrogées âgées de moins de 50 ans. En ce qui concerne la santé psychologique, 77 % des sondés affirment également être en bonne forme, un pourcentage qui reste stable d’année en année, mais qui est impacté par le stress rencontré. De plus, 38 % des chefs d’entreprise ne se sentent pas exposés à un risque de développer un problème de santé physique ou psychologique, d’addiction ou encore d’isolement.
Pour autant, tous les dirigeants ne sont pas logés à la même enseigne. En effet, le secteur influe grandement sur leur bien-être et certains secteurs d’activité sont source de maux. Par exemple, parmi les agriculteurs, seulement 65 % des personnes interrogées se considèrent en bonne santé physique, et 59 % en bonne santé psychologique. Ces statistiques soulignent les défis spécifiques auxquels certaines professions sont confrontées en matière de santé.
De plus, même si l’état de santé au global est plutôt bon pour la majorité, 70 % des entrepreneurs évoquent au moins une douleur ou un trouble physique (mal de dos, douleurs articulaires, troubles du sommeil, etc.).
Le point de vigilance se situe sur le suivi accordé à cette santé pour la majorité des dirigeants, qui ont tendance à s’oublier. En effet, 12 % des dirigeants admettent qu’ils ne consultent jamais de médecin et bien que 29 % des décideurs maintiennent un suivi régulier via des examens préventifs, ce pourcentage est largement inférieur à celui de la moyenne nationale qui est de 42 %. De plus, un tiers des sondés a déjà renoncé à se soigner. Une des raisons principale : la priorisation de leur activité pour 70 % des cas. Cependant, le renoncement va bien au-delà du suivi médical et se reflète dans d’autres décisions. Par exemple, l’enquête révèle que 2 jeunes dirigeants sur 10 ont déjà renoncé à un projet d’enfant pour se consacrer à son entreprise. Aussi, 4 dirigeants sur 10 ont déjà été contraints de prioriser leur activité au détriment de leur santé ou d’engagements plus personnels. Une notion de sacrifice qui semble donc être omniprésente chez les dirigeants.
Une prise de recul observée
L’enquête nous apprend que de plus en plus d’entrepreneurs se questionnent sur leur propre rapport au travail, quitte à se mettre en pause pour mieux repartir, comme nous l’annonce Sylvie Bonello “1 dirigeant sur 3 envisagerait une pause pour se ressourcer ou se réinventer, inimaginable il y a quelques années. La donne change.”.
De plus, les dirigeants sont assez lucides quant à la nécessité de revoir leurs priorités. Par exemple, 35 % admettent qu’ils redoutent de voir leur santé physique se dégrader et près d’un quart évoque le risque de dépression ou de burn-out qu’ils pourraient rencontrer. Pour se maintenir en bonne santé, ils ont mis en place des habitudes et des bonnes pratiques. En tête, nous retrouvons la bonne hygiène de vie (sport, alimentation, sommeil) qui est citée à 82 %, suivie du lâcher-prise à 78 % et enfin des moments de partage et de dialogue avec leur entourage, pour 66% d’entre eux.
Une prise de conscience qui se reflète dans les dernières grandes mutations du milieu professionnel : la semaine de 4 jours, les congés menstruels, le partage de la valeur ou encore l’inclusion.