Pour un grand nombre d’indépendants, la retraite demeure un sujet confus et insuffisamment maîtrisé. Une étude réalisée en décembre dernier par Blank, le compte professionnel des indépendants, et la FNAE (Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs) a révélé que 9 auto-entrepreneurs sur 10 ne possèdent pas de connaissances concrètes sur le fonctionnement de leur régime obligatoire. Ce manque d’information pousse de nombreux indépendants à naviguer à vue. Parmi les zones d’ombre, la retraite complémentaire se distingue, notamment pour les auto-entrepreneurs exerçant en libéral, qui cotisent peu, voire pas du tout, sans nécessairement en être conscients.
Pour rappel, les professions libérales ont un taux de cotisation de 21,1% (21,2% pour celles créées avant 2018 et ceux dépendants de la CIPAV), couvrant la maladie, la maternité, l’invalidité, le décès et la retraite de base. Cependant, ce taux est insuffisant pour financer la retraite complémentaire.
Pour remédier à cette situation, le gouvernement a décidé de faire évoluer le cadre actuel, avec une augmentation progressive des cotisations pour toutes les professions libérales à compter du 1er juillet 2024.
Fonctionnement de la retraire obligatoire pour les indépendants
Avant d’aborder le sujet principal de notre article, à savoir l’augmentation à venir des cotisations sociales pour les auto-entrepreneurs des professions libérales, il est bon de faire une piqûre de rappel sur le fonctionnement de la retraite obligatoire. À l’heure actuelle, elle se compose de 2 volets, celle dite de base, et celle complémentaire.
La retraite de base correspond aux cotisations sociales prélevées lors des déclarations mensuelles ou trimestrielles du chiffre d’affaires. Elle est donc obligatoire et concerne l’ensemble des personnes qui cotisent. Ensuite, en fonction de l’activité, l’auto-entrepreneur est :
- soit affilé à la CNAV – ou le régime général, dont le calcul des droits se fait sur le revenu annuel moyen qui correspond aux 25 meilleures années de cotisation ;
- soit rattaché à la CIPAV – ou le régime des auto-entrepreneurs libéraux, dont le calcul des droits fonctionne selon un système de points sur l’ensemble de la carrière à la CIPAV.
La retraite complémentaire vient s’ajouter à la pension “de base” et se calcule selon un système de points. Plus l’auto-entrepreneur cotise, plus il en cumule. Elle peut être gérée par de nombreux organismes tels que la RCI, la CIPAV ou Agirc-Arrco.
Pour ces deux retraites, elles ne seront complètes que si un nombre suffisamment de trimestres a été validé. Ceux-ci sont comptabilisés qu’au-delà d’un certain chiffre d’affaires, comme le résume le tableau ci-dessous. Attention, un auto-entrepreneur peut valider 4 trimestres maximum par an.
Des nouveaux taux dès juillet 2024
La nouvelle est tombée la semaine dernière : un décret en cours de publication prévoit d’augmenter progressivement les cotisations sociales des auto-entrepreneurs en activité libérale à partir de juillet 2024.
Ce projet, ainsi que l’échéancier associé, publié par Les Échos, révèlent que le taux passera à 23,1% au 1er juillet 2024, puis à 24,6% au 1er janvier 2025 et enfin à 26,1% au 1er janvier 2026 pour les professions libérales BNC ayant créé leur micro-entreprise après 2018.
Pour ceux adhérents à la CIPAV ou ayant lancé leur micro-entreprise avant 2018, le taux passera à 23,2% dès juillet et restera à ce niveau pour les deux années suivantes. Ceux bénéficiant de l’ACRE verront également leurs taux augmenter.
Une augmentation qui fait débat
Selon la FNAE, cotiser à un taux supérieur à 26% permettrait de se constituer une retraite complémentaire moyenne de 75 euros par mois, moyennant une cotisation annuelle supplémentaire de 500 euros.
Bien que ce décret ait pour objectif principal d’améliorer les cotisations des auto-entrepreneurs, cette augmentation des charges fait débat !
Tout d’abord, le décret ne comble pas le manque de cotisations pour la retraite complémentaire des auto-entrepreneurs entre 2018 et 2024. En conséquence, de nombreux professionnels se retrouvent avec un trou dans leur retraite complémentaire.
De plus, certains indépendants estiment que cette mesure pourrait alourdir leurs charges financières sans pour autant garantir une amélioration substantielle de leur pension future. Avec cette augmentation des cotisations, les entrepreneurs voient également leur marge baisser, ce qui pourrait affecter la viabilité de leurs activités.