La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) publiait il y a peu le nom des entreprises sanctionnées pour non-respect des délais de paiement. Parmi les sociétés citées, on retrouve des acteurs incontournables du territoire tels que Veolia, L’Oréal ou encore Brico Dépôt. De plus, selon une étude du cabinet Altares, la proportion d’entreprises françaises payant leurs fournisseurs avec un retard d’au moins 30 jours était de 7,6% au premier semestre, contre 5,7% il y a un an. Les chiffres révèlent également que les retards des entreprises de plus de 1 000 salaries avoisinent désormais 18 jours alors que les TPE se maintiennent à 11,5 jours.
Les petites structures en première ligne
Le fléau des retards de paiement a un réel impact sur la trésorerie, la compétitivité et sur la santé financière générale des entreprises concernées. Si l’on rajoute à cela la conjoncture économique tendue, la crise énergétique et l’inflation, on se rend vite compte qu’une grande majorité des TPE et PME françaises sont en souffrance. Alors, même si la DGCCRF tente d’intimider les entreprises coupables en mettant bien en évidence leur nom et les montants des pénalités sur son site internet, cela n’efface en rien la situation dans laquelle se trouvent les entreprises victimes.
Évalué à 15 milliards d’euros par la Banque de France, ce manque de trésorerie met réellement en péril la pérennité des entreprises.
Pour pallier à ce fléau, la Commission Européenne s’est emparée du sujet. Dans une FAQ dédiée à ce sujet, les réponses sont sans équivoque : “Une faillite sur quatre est due au fait que les factures ne sont pas payées dans les délais. L’une des causes premières des retards de paiement est l’asymétrie du pouvoir de négociation entre un client important ou plus puissant (débiteur) et un fournisseur de plus petite taille (créancier)”. Ainsi, pour soutenir les TPE et PME, la Commission Européenne souhaite mettre en place un cadre plus contraignant, obligeant les entreprises à payer en temps et en heure.
La commission européenne s’empare du sujet
La Commission Européenne a présenté courant de l’année un projet de règlement visant à encadrer plus strictement les délais de paiement dans les transactions commerciales entre entreprises mais également entre les entreprises et les autorités publiques. Avec comme finalité de soutenir plus activement les TPE et PME du territoire européen, ce projet entend réduire les délais de paiement à trente jours stricts (contre soixante jours actuellement), sans possibilité de dérogations, avec des sanctions immédiates sous la forme d’un versement des intérêts et indemnités. Pour la Commission Européenne, cette révision vise également “à instaurer l’équité dans les transactions commerciales, à accroître la résilience des PME et des chaînes d’approvisionnement, à favoriser une utilisation plus généralisée de la numérisation et à améliorer la culture financière des entrepreneurs”. Pour autant, cette mesure comporte un véritable frein : elle aurait pour conséquence d’accroître les besoins de trésorerie des entreprises, dans une période extrêmement tendue.
Des règles plus strictes
Parmi les principaux changements, nous pouvons noter :
- Le délai de paiement sera désormais fixé à 30 jours à partir de la réception de la facture, une période nettement plus courte que les délais standards applicables aux relations interentreprises, qui sont actuellement de 45 jours à la fin du mois ou de 60 jours à compter de la date d’émission de la facture par le fournisseur. Pour les entreprises publiques, le délai, initialement de 60 jours à partir de la réception de la demande de paiement, sera réduit à 30 jours en cas d’entreprise publique locale.
- Le débiteur sera tenu de payer des intérêts de retard, sauf s’il n’est pas responsable du retard de paiement. Les intérêts de retard seront automatiquement dus, éliminant ainsi la nécessité pour le créancier d’envoyer des rappels. Parallèlement, le créancier sera dans l’obligation de verser une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement. Cette automatisation de la facturation d’intérêts de retard et d’indemnités forfaitaires pour frais de recouvrement était rare jusqu’à présent, et en l’absence de cette facturation, les agents seront habilités à exiger du débiteur qu’il se conforme. De plus, l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement passerait de 40 à 50 €.
- Les autorités d’exécution disposeront des ressources et de l’expertise nécessaires pour s’acquitter de leurs responsabilités, assorties d’un ensemble de pouvoirs. En France, la DGCCRF risque d’être l’organisme désigné pour les contrôles des futurs règlements.